Victor Hugo n'a pas voulu prendre bravement pour devise le vers de Barthélemy :

L'homme absurde est celui qui ne change jamais.

Bien qu'il ait passé par toutes les opinions religieuses, politiques et littéraires, il aime à parler de l'unité de sa vie. Ce qu'il pense aujourd'hui, il ne l'a pas toujours écrit, car il faut ménager la lumière aux esprits, comme on ménage l'intérêt dans un roman bien conduit ; mais il l'a toujours pensé, ou à peu près. Il se peut qu'on trouve des nuances dans l'expression de ses sentiments, mais quoi de plus naturel ? N'y a-t-il pas mille manières de dire les choses, chacune convenable en son temps ? Peut-on parler aux peuples rois le même langage en 1840 qu'en 1830, en 1880 qu'en 1840 ? Grâce à des extraits de ses premières œuvres faits par l'auteur lui-même et publiés en 1834 sous le titre de : Littérature et philosophie mêlées, on avait cru tout cela, ou feint de le croire. Dans ce livre, en effet ainsi que le prouve, textes à l'appui, M. Biré, Victor Hugo a reproduit ses essais de jeunesse, non pas, comme il est dit dans la préface, intégralement et sans y rien changer, mais bien avec les modifications les plus arbitraires.

Quant aux faits, c'est par un moyen détourné mais également ingénieux que Victor Hugo est arrivé tantôt à les modifier, tantôt à les dénaturer complètement. Il fit lui-même son autobiographie sous ce titre : Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie. Que cet ouvrage ait été écrit sous les yeux du poète, sinon sous sa dictée, ce n'est pas douteux. Il vient du reste de le reconnaître en lui donnant place dans l'édition définitive, ne varietur, de ses œuvres complètes. Quand M. Biré contredit ce trop discret témoin il ne s'avance jamais que les mains pleines et lourdes de documents. C'est ainsi qu'après avoir établi minutieusement la généalogie des deux familles Hugo, l'une noble, l'autre roturière, il affirme que le poète appartient à la seconde. Son grand-père aurait été un simple menuisier de Nancy, ses ancêtres, des paysans. Je dois pourtant dire que les preuves apportées par M. Biré ne sont pas tout à fait aussi concluantes qu'il paraît le croire, et ajouter que l'importance d'une demi-rectification ne justifie pas la douzaine de pages qu'il y consacre. N'est-il point possible en effet, qu'une branche des nobles Hugo de Lorraine ait subi de graves revers de fortune ? Cette objection subsiste après la savante argumentation du biographe, je la fais, et d'autres l'ont déjà faite. Mais, si Victor Hugo porte indûment les armes des Hugo de Spitzemberg, d'azur au chef d'argent chargé de deux merlettes de sable, le mal n'est pas grand ; il fait moins de tort que d'honneur à cette famille, maintenant allemande de fait, quoique toujours française de cœur (2). Ce n'est pas ainsi qu'on écrit l'histoire, peut-on m'objecter; la vérité est toujours bonne à savoir. Mettons donc la question aux mains des généalogistes et passons.

Victor Hugo, ceci est ici hors de cause et a toujours été hors de doute, est un grand poète : il y a donc un intérêt très marqué à suivre pas à pas ses premiers essais, car il n'a pas débuté comme Lamartine, par un coup de maître, mais au contraire obscurément, par tâtonnements, cherchant sa voie. Puis, question piquante, ce roi des romantiques a-t-il toujours été romantique lui-même ? J'avoue que ce problème, dont nous n'avions jusqu'ici que des solutions insuffisantes, m'intéresse particulièrement. L'autre, celui des opinions religieuses et politiques du poète, se trouve, du reste, si intimement lié au premier que résoudre l'un, c'est résoudre l'autre.

Victor Hugo sort du collège, de la pension Cordier, avec la tragédie de rigueur. Il n'y a pas à s'en étonner. Cet accident est arrivé à tous les écrivains de ce siècle romantique, et même à plus d'un savant, à l'un des plus grands, à Claude Bernard. La tragédie de Victor Hugo avait pour titre Artamène, célébrait sous des noms égyptiens de convention, Actor, Zobéir, la chute de Napoléon l'usurpateur, le retour de Louis XVIII le roi légitime, et se terminait par ce vers :

Quand on hait les tyrans, on doit aimer les rois.

Cela ne promettait-il pas un poète, et un poète royaliste ?

Ici se place la rectification d'une anecdote propagée par Sainte-Beuve lui-même. « En 1817, raconte-t-il, Victor avait envoyé de sa pension au concours de l'Académie française une pièce de vers, sur les Avantages de l'étude, qui obtint une mention. La pièce du jeune poète de quinze ans se terminait par ces vers

Moi qui, toujours fuyant les cités et les cours,
De trois lustres à peine ai vu finir le cours.

« Elle parut si remarquable aux juges, qu'ils ne purent croire à ces trois lustres, à ces quinze ans de l'auteur, et pensant qu'il avait voulu surprendre la religion du respectable corps, ils ne lui accordèrent qu'une mention au lieu d'un prix. Or ce fut tout le contraire. Sur dix pièces couronnées, quatre avaient été jugées dignes d'un prix, les six autres de simples mentions. Victor Hugo venait au neuvième rang, et dans son rapport, Raynouard s'exprimait ainsi : « Si véritablement, il n'a que cet âge, l'Académie a dû un encouragement au jeune poète. » Voilà donc une petite légende de moins : l'homme, l'enfant d'abord, apparaissent ainsi petit à petit sous le dieu des dernières années. L'Académie décernant à Victor Hugo un accessit d'encouragement, pouvait-on tolérer dans l'histoire pareille impertinence !

Le jeune lauréat cueillit bientôt, comme on sait, d'autres couronnes aux jeux floraux pour ces odes charmantes : Le Rétablissement de la statue d'Henri IV, Moïse sur le Nil, mais il s'essaya en même temps dans un genre tout différent, la satire politique. M. Biré en cite une entière, le Télégraphe, dont voici le début :

Toi qui, seul de nos jours, pus, toujours agissant,
Servir tous les forfaits et rester innocent,
Discret avant-coureur de l'indiscrète histoire,
Télégraphe, où sont-ils, les beaux jours de ta gloire
?

Le reste est meilleur, souvent spirituel, mais inoffensif même pour les libéraux les plus malmenés, pour les libéraux qu'il exècre en politique comme en littérature. Sa grande admiration à cette époque était Chateaubriand ; depuis longtemps c'est Victor Hugo, lui-même, lui, toujours lui. Chateaubriand avait fondé un journal politique, Le Conservateur ; Victor Hugo fonde le Conservateur littéraire, qu'il rédige presque seul, aidé de son frère Abel et de quelques amis.

On le voit analyser et couvrir d'éloges attendris toutes les publications royalistes du temps, qu'elles soient de Chateaubriand ou de M. de Sapinaud de Boishuguet. A propos des Elégies vendéennes de cet inconnu, il écrit : « Les infortunes de l'armée royale ont quelque chose de sacré qui donne à ces élégies un air de continuation des saints cantiques. » Ce recueil est bien curieux à feuilleter. Voici une étude entière sur les œuvres posthumes de l'abbé Delille. Le jeune critique goûte fort « l'élégance et l'harmonie de son style ». Il fait l'éloge « du joli poème que le traducteur du Paradis perdu a laissé sur le Départ de l'Eden, et le loue « d'avoir changé le sauvage mécontentement qu'Adam témoigne à Eve, dans Milton, en une tendre commisération. Cette idée heureuse prouve que Delille connaissait parfaitement les délicatesses de la muse française. » Il aime Delille, mais il admire Corneille et Racine : « Les pièces de Shakespeare et de Schiller ne diffèrent des pièces de Corneille et de Racine qu'en ce qu'elles sont plus défectueuses. » Croirait-on que M. Scribe (on doit, toujours, prétend Théodore de Banville, dire M. Scribe, comme on dit M. Thiers ; c'est un privilège), que M. Scribe lui-même a eu l'honneur d'être jugé et porté aux nues par Victor Hugo ? L'auteur d'Oscar ou un mari qui trompe sa femme célébré par l'auteur de Ruy-Blas ! Mais il faut citer : « La Somnambule est un petit chef-d'œuvre où nous aurions honte de relever quelques invraisemblances et peut-être quelques incorrections. Ces défauts sont si légers que nous ne savons si les auteurs doivent chercher à les effacer ; souvent quand le tissu est délicat, en voulant enlever une tache, on le déchire. Parmi la foule des scènes vives et animées que présente cet ouvrage, il serait aussi difficile de trouver une situation froide qu'il est malaisé de trouver une idée dramatique dans la plupart des pièces qui se succèdent journellement sur nos théâtres. Le style rappelle celui de Beaumarchais ; et pour la liaison des scènes et le naturel, les auteurs ne nous semblent pas inférieurs à Sedaine. L'intérêt ne languit jamais, et l'attention est constamment éveillée sans être fatiguée. Les plaintes de Cécile vous attendrissent et le moment d'après vous riez aux éclats des plaisanteries de Frédéric. Voilà l'art tant vanté par Boileau. »

Le petit Conservateur faisait bonne figure à côté du grand. Tous deux défendaient la même politique, tous deux étaient les organes de la Société des Bonnes Lettres. Cette Société, dont le nom ferait un peu sourire maintenant, comprenait à peu près tous les écrivains royalistes de l'époque, les plus illustres comme les plus humbles, et Victor Hugo y figure à côté des Laurentie, des Vaublanc, des Féletz, des Genoude, des Bonald. Il lit ses odes aux séances de la Société ; il est le poète du parti, et le parti le protège. « L'Edimburg Review, dit Stendhal, s'est complètement trompée en faisant de M. de Lamartine le poète du parti ultra. Ce parti, si habilement dirigé par MM. de Vitrolles et Frayssinous, cherche à adopter toutes les gloires. Il a procuré à M. de Lamartine neuf éditions de ses poésies ; mais le véritable poète du parti, c'est M. Hugo. Ce M. Hugo a un talent dans le genre de celui de Young, l'auteur des Night Thoughts ; il est toujours exagéré à froid ; son parti lui procure un fort grand succès. On ne peut nier, au surplus, qu'il ne sache fort bien faire des vers français.

Edouard Mennechet, un confrère des Bonnes-Lettres présenta au roi dont il était le lecteur, les Odes et poésies diverses. Louis XVIII, heureux d'y trouver des dithyrambes sur la monarchie et nombre d'épigraphes empruntées à Horace, son poète favori, fit délivrer à Victor Hugo une rente annuelle de 1, 000 francs, qui dans la suite fut portée au double. Victor Hugo, pensionné du roi, ne put que s'affermir de plus en plus dans ses principes royalistes. Cela dura tant que dura la royauté légitime : 1830 fut son premier chemin de Damas.

De même que le témoin de sa vie rejette sur sa jeunesse et son inexpérience l'exagération de ses opinions politiques à cette époque, il prétend aussi que si Victor Hugo était timide en littérature, c'est que son entourage l'influençait et retenait l'essor de ses idées. Quand on écrit dans un journal à doctrine bien déterminée, on est quelquefois obligé de modifier, ou du moins de modérer ses opinions personnelles ; est-ce le cas pour Victor Hugo dans le Conservateur littéraire, où il était maître ; dans la Muse française, où Vigny, rien moins que classique, collaborait assidûment ? Je ne le crois pas ; mais, en tout cas, il lui restait le livre où se dédommager de sa contrainte, ses préfaces, ce genre où il a toujours excellé. Parcourons celle des Nouvelles Odes : « Il y a maintenant, écrit-il, deux partis dans la littérature comme dans l'Etat... Les deux camps semblent plus empressés de combattre que de traiter... Quelques voix importantes, néanmoins, se sont élevées, depuis quelque temps, parmi les clameurs des deux armées. Des conciliateurs se sont présentés avec de sages paroles entre les deux fronts d'attaque. Ils seront peut-être les premiers immolés, mais qu'importe ! C'est dans leurs rangs que l'auteur de ce livre veut être placé, dût-il y être confondu. »

Nous voilà loin de la préface de Cromwell, et ce rôle de juste-milieu littéraire est amusant chez le pourfendeur futur des classiques attardés. Il louvo[i]e, il admire tout dans toutes les littératures, depuis Calderon jusqu'à Boileau, auquel il revient décidément avec prédilection : « Nul ne pousse plus loin que l'auteur de ce livre l'admiration pour cet excellent esprit. Boileau partage avec notre Racine le mérite unique d'avoir fixé la langue française, ce qui suffirait pour prouver que, lui aussi avait un génie créateur. » Sainte-Beuve ne parlera pas autrement après sa demi-désertion ; mais qui attribuerait à Victor Hugo une page où Boileau est appelé génie créateur ? C'est piquant et cela provoque même un franc sourire. Sait-on quel est le seul reproche que Victor Hugo fait à « la littérature du siècle de Louis-le-Grand ? » Si elle « avait invoqué le christianisme au lieu d'adorer les dieux païens, si les poètes eussent été ce qu'étaient ceux des temps primitifs, des prêtres chantant les grandes choses de leur religion et de leur patrie, le triomphe des doctrines sophistiques du siècle dernier eût été beaucoup plus difficile, peut-être même impossible... Mais la France n'eut pas ce bonheur... Notre littérature était plutôt l'expression d'une société idolâtre et démocratique que d'une société monarchique et chrétienne ; aussi les philosophes parvinrent-ils, en moins d'un siècle, à chasser des cœurs une religion qui n'était pas dans les esprits. »

En ce qui touche la versification, il est loin d'être révolutionnaire. « S'il est utile et quelquefois nécessaire de rajeunir quelques tournures usées, de renouveler quelques vieilles expressions et peut-être d'essayer encore d'embellir notre versification par la plénitude du mètre et la beauté de la rime, on ne saurait trop répéter que là doit s'arrêter l'esprit de perfectionnement. Toute innovation contraire à la nature de notre prosodie et au génie de notre langue doit être signalée comme un attentat aux premiers principes du goût. » Ni la brisure du rythme, comme le remarque M. Biré, ni la césure mobile, ni l'enjambement n'étaient encore inscrits sur son programme. « Ses audaces, en ce temps-là, n'allaient même pas jusqu'à rejeter complètement le joug de la périphrase... Tandis que Jules Rességuier écrivait simplement :

Tes grâces sous ton schall te trahissent encore,

Victor Hugo, qui avait acheté à sa jeune femme, avec le produit de la première édition des Odes et Poésies diverses, un beau schall Ternaux, ne se décidait à l'introduire dans ses vers qu'après l'avoir soigneusement enveloppé dans les plis de cette périphrase :

Couvre-toi du tissu, trésor de Cachemir.

Cependant les Odes et Ballades allaient paraître et Sainte-Beuve saluait dans le Globe un grand poète de plus.

M. Biré, suivant le titre de son ouvrage, conduit le lecteur jusqu'en 1830 ; moi qui dois me borner et me résigner à ne pas tout dire, je m'arrêterai là, en commençant ma conclusion par quelques critiques ; les éloges viendront ensuite. Comment l'auteur s'égare-t-il jusqu'à porter un jugement général sur Victor Hugo, ce qui est complètement en dehors de son sujet ? Le Victor Hugo qui finit en 1830 lui appartient seul ; mais encore cette date, au point de vue littéraire, est-elle absolument arbitraire. La première phase de la vie du poète ne se termine-t-elle pas à la fameuse préface de Cromwell, qui est de la fin de 1827 et dont Théophile Gautier a dit : « Elle rayonnait à nos yeux comme les Tables de la Loi sur le Sinaï, et ses arguments nous semblaient sans réplique. » Si encore l'appréciation qu'on nous donne était juste et littérairement établie, je ne réclamerais pas, mais elle est un peu fantaisiste. M. Biré semble croire que les plus grands poètes sont ceux qui ont fait verser le plus de larmes, et part de là pour donner à Victor Hugo l'infériorité sur Lamartine. Comment feront les critiques aux yeux secs ? Tout le monde n'a pas le don des larmes et l'on aime bien à juger d'après soi. Pleurent les gens sensibles ; cela n'a rien à voir avec la littérature, ni même avec la poésie. Savez-vous, à ce compte, quel serait le premier auteur dramatique du siècle ? Peut-être Bouchardy, peut-être M. Dennery. Ce n'est pas sans doute ce que l'auteur a voulu dire, mais je ne m'arrête à son idée que pour lui en montrer le côté facile à parodier, et je reviens aux faits.

Après la lecture du livre de M. Biré, on demeure stupéfait du chemin parcouru par les idées et par les sentiments de Victor Hugo. Il y a si loin des Odes et Poésies diverses aux Quatre Vents de l'esprit, qu'on doute, en vérité, que ces deux œuvres soient du même auteur ; je ne parle point de la forme, qui du simple va au complexe et même au compliqué, mais du fond. Nous voyons Victor Hugo, de royaliste ardent et de catholique ardent, devenir aux mains de la basse démocratie l'insulteur de tout ce qu'il avait adoré, de tout ce qui avait fait sa gloire.

Qu'on ne croie pas cependant que M. Biré soit, pas plus que moi, qui en suis bien éloigné, un contempteur de Victor Hugo. Ce serait mal et ce serait absurde de rendre insulte pour insulte à un grand poète que les malheurs ont aigri et que la gloire a gâté. Mais il constate la vérité quelquefois avec une malicieuse ironie, et en cela il a raison. Victor Hugo n'a pas eu la franchise d'avouer ses premières années d'écrivain et le courage d'en revendiquer la responsabilité. Qu'il en soit puni tant mieux ! Elle est pourtant belle la jeunesse du poète, qui va, dès quinze ans, grandissant dans la célébrité, aimé de tous, fêté par son parti, estimé de ses adversaires. Elle est si belle, cette jeunesse qu'il s'est plu à travestir, si pleine d'amour et de poésie qu'un dieu, un Bakkos ou un Apollon, n'en aurait pu souhaiter une plus enviable ! « Ceux qui admirent véritablement Victor Hugo, dit fort bien M. Biré, ce ne sont pas ceux qui exploitent son nom et sa gloire, ce sont ceux qui oublient l'homme politique pour ne voir que le poète... qui, après avoir fait la part équitable du bien et du mal dans son talent et dans ses œuvres, constatent sans les réduire et sans ses surfaire ses titres à l'immortalité. »

Ce ton courtois, qui ne se dément presque jamais, n'est pas sans ajouter à la valeur documentaire de l'ouvrage. La critique faite sans passion est la seule qui puisse inspirer confiance à un lecteur sérieux. Les sources sont du reste abondamment et minutieusement citées. Il y en a de connues et d'inconnues, et même d'inédites, telles que des lettres d'Alfred de Vigny et de Sainte-Beuve. En somme, nous avons dans ce volume de plus de cinq cents pages quantité de matériaux qui auraient manqué aux historiens futurs de la littérature française au dix-neuvième siècle, si M. Biré, avec sa patience de chercheur et son flair de fureteur toujours heureux, ne s'était mis courageusement à leur poursuite. Son livre est de ceux qui resteront, de ceux qu'il faut lire avant de parler d'une époque, sous peine d'en parler mal : Mettre l'histoire à la place de la légende est quelquefois une œuvre périlleuse, toujours une œuvre méritoire : l'auteur du Victor Hugo avant 1830 a bien mérité des lettres.

Rémy DE GOURMONT.

(1) Victor Hugo avant 1830, par Edmond Biré. Jules Gervais, 1885. 1 volume in-18.

(2) Ces Hugo obtinrent en 1870 l'autorisation de ne pas prendre les armes contre la France.

[Le Contemporain, « Mélanges et Notices. Un Victor Hugo inconnu », décembre 1883]