L'Humanité nouvelle, mai 1900, p. 100 |
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Le Vieux Roi (1) publié en une très belle plaquette sur papier d'alfa, donne bien en sa brièveté la synthèse du talent précieux de M. Remy de Gourmont. Des phrases mélodieusement agencées, des clartés comme d'eau claire à travers l'œuvre, et des choses perverses. C'est exquis et grotesque, invraisemblable et touchant. Le vieux roi Gildas est une figure étrange qui impressionne : « Je suis le roi, je suis tout, toute la patrie, la forêt, la rivière, le château, la ville, la tour, les hommes, les femmes et les enfants. Je suis tout et je ne suis rien : un vieux mot, un vieux roi, une torche qui va mourir. Ils ne veulent plus comprendre que les mots sont des coffrets pleins de gemmes, de médailles, de colliers... Ils verront, quand les coffrets seront brisés, quels trésors les hommes avaient cachés là, sous les syllabes sculptées par les siècles... ils verront, quand le fil d'une hache ou la pointe d'une épée auront assassiné le vieux roi... Ils verront tout ce qu'il y avait dans son cœur, tous les sourires, tous les désirs, tous les plaisirs, toutes les larmes d'un peuple. Il en sortira du sang et de l'eau, du vin et du lait... » Les scènes finales semblent écrites pour un jeu de marionnettes ; mais même et surtout avec ses défauts, cette piécette est d'une bien captieuse originalité. (1) Société du Mercure de France, 2 fr. |