Correspondance de Joseph Couraye du Parc |
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1. A sa sœur, Marie, Paris, s.d. [B.N.]
Hier, j'ai été abordé dans la rue par un pauvre demandant l'aumône, à peine vêtu et dans un état de misère horrible ; figure-toi, j'ai reconnu un de mes anciens camarades du lycée de Coutances ; je ne sais trop s'il m'a reconnu ; je crois que oui ; il s'appelait H*** ; son père était un vieux capitaine en retraite qui venait souvent au lycée pour donner des coups de canne à son rossard de fils qui poussait des cris lamentables à notre grande joie (cet âge, etc.) ; ce genre d'éducation semble avoir peu réussi puisque l'infortuné Ulysse demande la charité dans les rues ; j'ai été si stupéfait, je n'ai pas eu le temps de le questionner; j'étais d'ailleurs avec quelqu'un qui me causait d'une affaire qui me préoccupait et j'ai machinalement donné vingt sous en continuant ma conversation ; si je le rencontre, je pourrai au moins lui proposer de vieux habits et de s'adresser à la société de secours des anciens élèves ; je t'assure qu'il m'a fait une très vive pitié, qu'il ne mérite pas probablement ; cela me semble si étonnant que bien que je l'aie reconnu sans la moindre hésitation en le voyant, je me demande maintenant si je ne me suis pas trompé. J'ai cependant raconté cela à Gourmont qui m'assure qu'il avait ses deux baccalauréats (extrait reproduit avec l'aimable autorisation d'Anne Cahierre, petite-nièce de Joseph Couraye du Parc ; tous droits de reproduction réservés). |