Georges Batault : La Philosophie de M. Bergson, 193
Albert de Bersaucourt : Balzac et sa « Revue Parisienne », 212
Fernand Benoît : La Foire aux Paysages, poèmes, 233
André Gide : Quelques Mots sur Emmanuel Signoret, 243
Paul Louis : Le Syndicalisme français, 248
Gabriel Mouret : Des roses sur la mer, poèmes, 261
G. Meredith (Marguerite Yersin trad.) : L'Histoire de Chloé (VII-X, fin), 264

REVUE DE LA QUINZAINE

Remy de Gourmont : Epilogues : Dialogues des Amateurs : LVII . Dieux et Martyrs, 290
Pierre Quillard : Les Poèmes, 293
Rachilde : Les Romans, 297
Jean de Gourmont : Littérature, 302
Edmond Barthèlemy : Histoire, 305
Jules de Gaultier : Philosophie, 311
Gaston Danville : Psychologie, 314
Docteur Albert Prieur : Psychiatrie et Sciences médicales, 319
Henri Mazel : Science sociale, 323
Charles Merki : Archéologie, Voyages, 327
José Théry : Question juridiques, 332
Charles-Henri Hirsch : Les Revues, 336
R. de Bury : Les Journaux, 341
Maurice Boissard : Les Théâtres, 346
Jean Marnold : Musique, 350
Charles Morice : Art moderne, 356
Paul Souchon : Chronique du Midi, 360
Henry-D. Davray : Lettres anglaises, 366
Michel Mutermilch : Lettres polonaises, 369
Lucile Dubois : La France à l'étranger : Stendhal en Amérique, 374
Mercure : Publications récentes, 378

Echos, 379


LES JOURNAUX

Fabre d'Eglantine : Stendhal et L'Orange de Malte (L'Intermédiaire, 30 janvier et 20 février ; La Dépêche, 2 mars). — Autour du Maître de Victor Hugo (Le Petit Temps, 1er mars). — Nouvelles du jour (Le Chroniqueur de Paris, 27 février).

L'Orange de Malte est un titre bien connu des stendhaliens, qui savent aussi quelle en est l'origine. Ainsi s'appelait une comédie perdue de Fabre d'Eglantine, comédie chère à l'auteur de Lucien Leuwen. Mais est-elle perdue sans retour ? Ne peut-on du moins espérer d'en retrouver quelque trace ? Peut-être. Et c'est ce qu'explique dans la Dépêche M. Remy de Gourmont, complétant et coordonnant les renseignements donnés par l'Intermédiaire :

Au moment de gravir les marches de l'échafaud, dit un des historiens de Fabre d'Eglantine, il aurait jeté au hasard, dans les groupes des spectateurs, quelques manuscrits, en criant d'une voix émue : « Mes amis, sauvez ma gloire ! » Plusieurs de ces pièces, ajoute M. d'Almeiras, furent recueillies par des curieux et l'une d'elles, l'Orange de Malte, tomba sous la main de deux auteurs dramatiques qui la refirent sous le titre de l'Espoir de la Faveur. » Là-dessus, un collaborateur de l'Intermédiaire s'est levé et a déclaré : Je connais quelqu'un qui paraît bien avoir lu ou entendu cette comédie, c'est Stendhal. Et il citait un passage de Rome, Naples et Florence où le sujet de l'Orange de Malte est nettement indiqué en deux lignes : « Un évêque voulant engager sa nièce à être la maîtresse d'un prince, tout en lui faisant des remontrances. » Cet intermédiairiste était sur la bonne voie, mais il est resté à moitié chemin. S'il avait consulté le Journal de Stendhal, il eût trouvé un document grâce auquel le premier chercheur venu peut mettre la main sur ce qui reste de l'Orange, probablement la pelure, c'est-à-dire une médiocre imitation. Stendhal écrit à la date du 7 avril 1805 : « Maisonneuve parlait de l'Orange de Malte de d'Eglantine dont les deux pièces d'hier sont une imitation. La pièce de d'Eglantine était du plus grand génie. J'ai senti, en l'entendant esquisser, que le genre comique était mes premières amours. Dans la pièce de d'Eglantine, il y avait une maîtresse de roi et un évêque. L'évêque venait persuader à la jeune personne de différer son mariage, et lui faisait un tableau du bien que pouvait faire une femme vertueuse ayant toute influence sur un prince ; arrivait la maîtresse régnante qui tonnait contre les femmes qui se livraient surtout par intérêt ; cela était du plus grand comique. Maisonneuve nous dit qu'il en avait parlé six ou sept fois à fond avec d'Eglantine, une fois entre autres depuis dix heures du matin jusqu'à onze heures du soir. Il me semble que d'Eglantine est le plus grand génie qu'ait produit le dix-huitième siècle en littérature. L'Espoir de la Faveur inclinant toutes âmes à la bassesse, de quelque caractère qu'elles soient, et cet espoir se trouvant ensuite déçu, est un excellent moyen de développer le courtisan. Voilà la griffe du lion. Maisonneuve croit que la pièce n'a jamais été écrite, Dugazon que les trois premiers actes existent.

Si donc l'on rapproche de l'anecdote citée par M. d'Almeiras l'analyse de Stendhal, ses renseignements, les mots soulignés par lui-même, on arrive nécessairement à cette conclusion : Deux pièces rappelant le sujet de l'Orange de Malte, tel que le connaissait Maisonneuve, collaborateur de Fabre d'Eglantine, ont été jouées à Paris le 6 avril 1805. L'une de ces pièces avait pour titre, l'Espoir de la Faveur. Reste à trouver l'auteur ou les auteurs, ce qui n'est qu'un jeu pour les érudits de la littérature théâtrale.

Maintenant, il est singulier que l'on ait joué le même soir deux pièces ayant le même sujet. S'il n'y a pas erreur de rédaction, il faudrait en conclure que l'Orange de Malte était connue de plusieurs personnes et qu'elle avait à ce moment une sorte de célébrité mystérieuse. Il ne faut pas oublier qu'en ce temps-là le Philinte de Fabre d'Eglantine passait pour un chef-d'œuvre pas très loin du Misanthrope de Molière. La moindre de ses dépouilles était tenue pour une chose précieuse dont les adaptateurs se disputaient la restauration et le succès probable. Il est fâcheux que Stendhal, si indiscret d'habitude, ait été si sobre de renseignements sur les deux pièces en question. Enfin, si on les retrouve, on pourra voir du moins quel parti les auteurs ont tiré du sujet si piquant imaginé par Fabre d'Eglantine. Stendhal rapproche l'Orange de Malte de la Vérité dans le vin. C'est aller loin dans l'éloge, car la pièce de Collé est un incontestable chef-d'œuvre, malgré quelques gaucheries. Acceptons ce jugement, puisque, aussi bien il nous est impossible de le contrôler. On sait que Stendhal fut poursuivi toute sa vie par ces syllables hermétiques « l'orange de Malte ». Il écrivit lui-même sous ce titre un roman inachevé qui est devenu Lucien Leuwen. S'il y renonça, au dernier moment, c'est qu'il ne croyait peut-être pas la pièce de Fabre d'Eglantine définitivement perdue. Ayons le même espoir, pour la gloire de ce poète charmant, pour l'auteur d'Il pleut, il pleut, bergère !

§

On publie la troisième ou quatrième édition définitive des œuvres de Victor Hugo, ce qui prouve au moins qu'il v a encore des gens qui croient au définitif. C'est une maladie tenace. Cela indiquerait aussi qu'il y a beaucoup de bourgeois qui font relier les œuvres complètes de Victor Hugo, comme leurs grands-pères faisaient relier celles de Voltaire. La gloire littéraire, ce n'est pas d'être lu, c'est d'être relié. Les préfaces de cette nouvelle édition mériteraient cependant d'être parcourues. C'est ce qu'a fait un rédacteur du Petit Temps qui y a trouvé des renseignements peut-être inédits (sait-on jamais) sur l'envers du théâtre de Victor Hugo, sur la préparation et la mise à la scène de ses œuvres. Voici les anecdotes concernant le Roi s'amuse et Lucrèce Borgia : [...].

§

Le Chroniqueur de Paris est un fort amusant journal hebdomadaire. Instructif aussi. On y apprend des tas de choses :

Que M. Jules Lemaître gagne mille francs par jour à découvrir que Racine était un poète dramatique du XVIIe siècle qui fit plusieurs tragédies curieuses, ce qui, — c'est moi qui parle — intéresse prodigieusement les gens à automobile. Il y en a depuis Saint-Thomas-d'Aquin jusqu'à Saint-Germain-des-Prés. Le pétrole monte comme un encens. Les gens à fiacre et à pattes sont proscrits comme inélégants....

Que MM. Rostand et Bataille vont faire des Faust que M. Catulle Mendès pourra comprendre ;

Que Sarah Bernhardt a offert sa collaboration à M. Bataille, qui hésite. Elle se chargerait des coupures ;

Qu'un ami de la maison disait l'autre jour, en sortant du Gaulois : « Je viens de féliciter M. Arthur Meyer de ce qu'il a bien voulu continuer le sang des Stuart » ;

Et beaucoup d'autres choses.

R. DE BURY.

pp. 341-345.


LES THEATRES

THÉÂTRE DES ARTS : Quand on tenait la poule..., comédie en un acte de M. Ernest Gaubert (15 février). — ODÉON : Electre, tragédie en trois épisodes, un prologue et un épilogue, traduite d'Euripide par M. A.-Ferdinand Herold (13 février). L'Avare chinois, comédie en 4 actes et 6 tableaux, d'un auteur chinois inconnu, corrigée sous la dynastie des Ming par Tsan-Tsine-So, traduite et adaptée par Madame Judith Gautier, musique reconstituée d'après les documents chinois par M. Bénédictus (17 février). — BOUFFES-PARISIENS : Aux Bouffes... on pouffe ! revue en 3 actes et 7 tableaux, de MM. Rip, Wilned et Paul Fargue, musique nouvelle et arrangée de MM. Philippe Moreau et Willy Redstone (20 février). — Une anecdote sur M. Jean Moréas. — Une lettre. — Mémento [...].