Contre : Blasco, l'homme de Valencia. Valencia d'Espagne : abondance de fruits. Coliques possibles, malgré l'astringent et inévitable riz du pays : El arroz a la valenciana. Piments, abatis de poulets, moules, tomates, sel, poivre, riz exquis et bien cuit, de tout ; couleur locale: l'idiome du patelin : le Valencien. Blasco Ibañez nourrissait sa littérature de l'arroz à la valenciana, quelque chose, quant à la cuisine au beurre, comme le Dictionnaire Larousse quant à l'érudition. Blasco, politicien. La politique des pays au-dessous de la Loire : un homme, ses clients, calomnies des ennemis électoraux, couteaux au besoin, et trucs pour réussir aux élections. Pas de surabondance d'idées générales. Le tout est transposable dans ce qu'on appelle le roman. L'immanquable Sainte Vierge, chargée de vrais bijoux, sert de pèlerinage, c'est-à-dire de prétexte aux gueuletons en famille. Sous les orangers, on se cherche et on s'embrasse. Ceux qui sont seuls ne sont pas contents. Heureusement qu'il y a las Toros qui servent de dérivatif à la fureur mystico-religieuse.

Pour : Mais tous ces détails de la vie de là-bas, sont vrais. Aujourd'hui, nous admettons dans le genre cacophonique encore appelé roman, même des noms de personnages vivants, et des reportages historiques. Dans ce temps-là, on admettait le reportage sentimental, et de faits-divers. Epoque, et surtout pays, de foi-passion, de foi-potin. Faut-il peindre l'Espagne comme elle est ou comme nous la souhaiterions ? Bavarde, la femme très peu cultivée — avec des exceptions dramatiquement géniales (vous les savez) des gens qui ont besoin de voir, pour croire, et peut-être pour penser. L'idée sort du mouvement. (Il reste toujours le couvent pour méditer en paix.) Ses romans internationaux, d'effet, et qui empruntent leur actualisme aux rubriques de politique étrangère, au lieu de la chronique provinciale qui est l'Histoire quotidienne d'une Espagne, y compris celle des grandes conquêtes; laissons-les. Mais ses romans valenciens ! Valencia d'Espagne... au fait, puisqu'il faut nous voronofiser, rapport à la déficience de notre sentimentalité, est-ce si expédient d'aller jusqu'au primitivisme ultra-marin ? Si on essayait un peu de ses romans sur Valencia ! Quel don de vie !

Et puis, c'était un si grand ami de la France.

ADOLPHE FALGAIROLLE.

(L'Ami du lettré. Année littéraire & artistique pour 1929, Les Editions de France, 1928, pp. 166-167)