ÉCHOS

Mort de Marcel Collière. — Mort du poète Henri de Lisle. — « Le plus grand romancier anglais ». — Le Sottisier universel. — Publications du « Mercure de France ».

Mort de Marcel Collière. — Marcel Collière est mort le 26 février dernier.

Il était né le 10 février 1863. Au lycée Fontanes, où il terminait ses études, il se lia avec Ephraïm Mikhël, Pierre Quillard, André Fontainas, Stuart Merrill, Rodolphe Darzens. Il fut, à la Sorbonne, un des élèves assidus d'Alfred Croiset, et il publia une fort intéressante étude sur la langue de Théocrite dans les Syracusaines, étude qu'il avait écrite en collaboration avec Pierre Quillard.

En 1886, il fut, avec Ephraïm Mikhaël, Pierre Quillard, Rodolphe Darzens, Saint-Pol-Roux, Camille Bloch, un des fondateurs de la Pléiade. Ce fut dans cette revue que parurent ses premiers poèmes. Il en fit plus tard un recueil, La Mort de l’Espoir. Les poèmes de Collière sont toujours d'une forme très pure et d'une pensée très noble. Vers le même temps, L'Echo de Paris donna, de lui, une importante nouvelle, Comtesse Blonde. En 1896, il fit représenter, à l'Odéon, une adaptation dramatique des Syracusaines.

De 1901 à 1906, il donna à L'Européen des chroniques élégantes, spirituelles et ingénieuses, et, durant plusieurs années, il tint au Mercure la rubrique histoire.

Collière avait été chargé d'une mission en Indo-Chine, et il avait professé à Salonique et à Tunis. Son érudition était grande et ses amis n'oublieront jamais le charme constant de sa conversation, variée sans cesse, et toujours sage. — A. F. H.

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Mort du poète Henri de Lisle. — Henri de Lisle est mort le 27 février, à Lyon. Il était né à Amiens en 1878. Il avait débuté au Chat Noir, en 1897, et de cette date jusqu'à la guerre, collaboré, de façon très intermittente, à la Revue Septentrionale. Il avait fondé, je crois, La Vie avec M. Ernest Gaubert et Georges Philippe. C'est du moins à La Vie qu'il donna, en collaboration avec ce même Georges Philippe, un curieux article : Mission du Nord, dans lequel il préludait, en somme, au régionalisme discret qui a d'abord marqué son œuvre, aussitôt quittée la Picardie où son âme avait sombré, disait-il volontiers, dans les tristes marais.

A partir de 1900 jusqu'en 1914, il donne le principal de sa production à la revue Le Beffroi. C'est aux éditions du Beffroi qu'est paru de lui L'Ecclésiaste (1909), adaptation en vers de la Vulgate et deux autres recueils plus importants, œuvre de la maturité lyrique : Au large (1910) et La Sage Ardeur (1912). Henri de Lisle a écrit là des poèmes d'intimité et d'amour d'une véhémence contenue et d'une inspiration modérée et réfléchie. Henri de Lisle qui avait, en outre, traduit la plupart des œuvres de Dante-Gabriel Rossetti, fit paraître de nombreux extraits de ce travail dans plusieurs revues. Son principal ouvrage en prose, écrit d'ailleurs en collaboration avec Henri Deslinières, vit le jour sous un double pseudonyme. Il s'agit du Petit Musée de la Conversation, par Félix Castigat et Victor Ridendo. C'est un plaisant recueil de lieux communs et d'aphorismes prudhommesques, qui obtint, quand il sortit des presses du Mercure de France, en 1911, un succès très mérité.

Henri de Lisle n'en était pas à son coup d'essai.

A diverses reprises, en vers comme en prose, il avait témoigné, de son esprit ironique et de sa malice a l'endroit de ses contemporains notoires dans une série de petits ouvrages parus sous le pseudonyme narquois de Jules Marry. Le Jardin Potager (Société Anonyme, Blois 1902) n'est pas le moins curieux de ces voluminets, ni On ouvre le vasistas (id., 1903), dont Léon Deubel parle dans une de ses lettres, le moins satirique. Mais où les trouver, aujourd'hui ?

Avec notamment Henri Deslinières, Ernest Gaubert, Michel Tavera et Manoel Gahisto, il avait participé aux frais de l'édition des œuvrettes éparses et des manuscrits de Georges Philippe, réunis sous le titre Les Jardins de Bade, en 1909. En correspondance à ses débuts avec Albert Samain, il avait assisté maintes fois de ses deniers Léon Deubel. — LEON BOCQUET.

Mercure de France, 15 mars 1932, p. 761-763.