Adolphe Van Bever.

Après une maladie qui le tortura durant de longues années, Adolphe Van Bever est mort à Paris en son logis, 5, rue de Tournon, dans la soirée du vendredi 7 janvier 1927. Il était né à Paris, le 25 décembre 1871, d'une famille d'origine hollandaise.

Son enfance et son adolescence furent extrêmement malheureuses ; il fut un primaire dans le sens le plus émouvant du terme lorsqu'il s'applique à un être qui, né pauvre, se découvre un jour avide d'acquérir la science et les méthodes d'un chartiste.

La vie le condamna jusqu'à dix-huit ans aux plus dures besognes. Léautaud nous a montré, dans une saisissante notice, son ami employé comme garçon livreur par un marchand de porcelaines : il n'est que de se rappeler la silhouette chétive, l'aspect malingre de Van Bever pour ressentir ce qu'il y a de douloureux dans cette évocation.

A dix-huit ans, il fut secrétaire du théâtre de L''œuvre, puis de 1897 à 19I2, secrétaire au Mercure de France. Il se consacra ensuite à ses travaux d'érudition.

Le courage déployé par Van Bever fut aussi grand que ses misères physiques furent cruelles et réussit à le faire triompher en partie de celles-ci. En partie seulement car, lorsque son nom commençait à s'imposer, le tabès dont il était atteint s'aggrava et fit de sa vie un véritable martyre. On admirait qu'il pût rester toujours affable et, qu'en dépit des souffrances, toutes ses heures fussent consacrées au travail littéraire.

Il a réédité, commenté, annoté, enrichi de textes oubliés ou inédits près de cent volumes. On lui doit d'heureuses réalisations comme les « Maîtres du livre » et les « Variétés littéraires » ; avec Paul Léautaud, il composa, en 1900, l'Anthologie intitulée Poètes d'aujourd'hui qui marque une époque littéraire.

Son éloge funèbre tient tout entier dans les paroles prononcées par Maurice Renard sur sa tombe, au cimetière de Gros Rouvre :

« Être bon et souffrir. Travailler et souffrir. »

Léon DEFFOUX.

(L'Ami du lettré. Année littéraire & artistique pour 1928, Grasset, 1928, pp. 170-171)