M. de Gourmont, me considère comme l'esprit le plus médiocre et le plus capable d'errer, et il est surpris que je ne l'admire pas ! Il n'est pas logique. Au reste, il se trompe : je lui trouve beaucoup de talent ( France).


Nous connaissons bien mal nos vraies gloires ( Apollinaire)

Remy de Gourmont qui, cette année-là, 1892, nous donna un très court mais très précieux article "L'Ivresse Verbale" était déjà regardé comme une des têtes de notre génération littéraire. Il était un peu plus âgé que nous et nous le respections comme un grand aîné (H. Mazel).

ce répugnant polygraphe qui, dans le fond, comme les gens sans cœur et sans conscience, est incapable de comprendre rien à rien (Claudel à Gide).

tous nos R. de G. et nos B. L., qui sont de si grands philosophes vus du bas de la foule et de si hauts littérateurs avec qui raisonne peu (Valéry à Gide).

Remy de Gourmont a eu droit au titre de maître et de guide. Il reviendra (K. Haedens).

Gourmont a exercé une influence profonde sur la vie intellectuelle, de Victor Segalen à Blaise Cendrars — qui raconte leur rencontre dans Bourlinguer, — d'Apollinaire à Léautaud, qui ne cesse de l'évoquer dans son Journal. Le lire aujourd'hui est un exercice aussi plaisant que salutaire : on en oublie l'imposture, le jargon, la vacuité d'une époque subjuguée par la «médiacratie» (P. Kyria).

Pendant vingt-cinq ans, de 1890 à sa mort, la lucidité, le scepticisme et la curiosité que Gourmont manifestait chaque quinzaine dans le Mercure ont fait de lui le maître à penser de la génération d'avant guerre. Et au-delà, « Moravagine » (1926) révèle son influence sur Blaise Cendrars, qui s'en réclamera encore en 1946 dans « L'Homme foudroyé » (F. Lacassin).

Jusqu'à présent, Gourmont n'a été la « tarte à la crème » que de quelques-uns. Mais quels ! Ezra Pound, Borges, Léautaud... A l'avenir, vous ajouterez mon nom (A. Rinaldi).

Je ne sais comment réfuter Gourmont. Il a raison de tous les côtés. Mais il a tort au centre ( Alain-Fournier à J. Rivière).

un grand merci à notre Gourmont pour ce délectable Imagier (Mallarmé à Jarry).

Quant à Vers et Prose, son fascicule de novembre est fort mélangé. Rémy de Gourmont a eu le tort d'y laisser paraître deux poèmes médiocres du symbolisme le plus désuet, par quoi il prouve qu'un sévère connaisseur de poésie peut avoir de fâcheuses complaisances envers lui-même (Romains).

Quant au duc, le grand Saint-Simon, [...] c'est mon second maître, après Rémy de Gourmont, pour l'usage des mots et le maniement de la langue (Cendrars).

l'absurde logicien Remy de Gourmont et quelques autres symbolo-ghettos (L. Daudet).

Enfin, nous fûmes invités aux mardis du Mercure de France ! [...] Il nous fut alors possible de voir nos grandes personnes autrement que dans des formes de fantômes : Remy de Gourmont, qu'une ombre déjà suspecte gagnait à la joue, comme un grain monte sur la campagne, et qui commençait de se montrer le moins possible et se retirait dans la petite bibliothèque ; Henri de Régnier [...], Valéry, [...] (Fargue).

Un individu quelconque sans vertu, sans talent, sans intelligence, disons un Rousseau ou un Rémy de Gourmont (et pour ma part je dirais aussi bien un Kant ou un Renan), imagine une idée, une seule pauvre idée, aussi absurde qu'on voudra, aussi répugnante qu'on voudra, n'ayant pour lui que le dégoût et le désespoir : il se trouve des gens par foules pour le suivre (Claudel à Gide).

Les derniers grands écrivains, — il n'est pas question de mon goût — , ont été Flaubert, Gourmont, Zola (Léautaud).

Luxuriante et originale de pensée, exquise d'esthétisme et de sentiment, cette âme est parmi les plus précieuses de notre temps (Dermée).

Et moururent Féret et Gourmont, le premier, mon plus grand ami et le plus grand poète moderne de sa province ; le second, le plus attrayant sophiste de son temps, et, après Moréas et Anatole France, le plus grand écrivain (Fleuret).

Car je n'écrivais que pour mériter un jour le suffrage d'un homme que je jugeais d'un goût si difficile et qui me paraissait être le premier des écrivains, le Régent des Lettres contemporaines ( Fleuret).

Je parlais ce matin à Vallette de cette influence indéniable de Gide, et je lui disais qu'il n'en est pas de même de Gourmont. Gourmont n'exerce aucune influence. On l'apprécie, on le lit, mais rien de plus. Vallette n'avait pas l'air d'être de mon avis. Il reconnaît la grande influence de Gide, mais dit que les jeunes gens viennent aussi à Gourmont. Je veux bien, mais sans montrer cette influence qu'ils montrent sur eux de Gide et de ses livres. On pourrait expliquer cela en disant que Gourmont est surtout tout intelligence. On n'imite pas l'intelligence, les idées. Tandis que la sensibilité agit davantage et peut au moins être imitée ( Léautaud).

Celui qui a fait les plus nobles efforts vers la liberté, c'est Remy de Gourmont. Je comprends maintenant pourquoi, sans l'aimer, j'estime si fort cet homme. Il est sûr qu'il se tend avec une obstination magifique vers une interprétation originale. Mais je crois percevoir aussi le préjugé (très délicat) qui entache d'équivoque ses observations ; et c'est justement le souci de l'originalité : il se préoccupe trop de voir autrement qu'on a vu avant lui, il tâche trop de se distinguer par l'imprévu de ses jugements. En d'autres termes il s'efforce trop pour penser librement. Son attitude raidie le rend même parfois déplaisant. Mais c'est la passion dont il brûle qui est belle (J. Rivière à Alain-Fournier).

Encore à l'heure actuelle, je confesse qu'en vertu d'une longue intimité avec ses œuvres qui m'ont appris à comprendre mieux l'écrivain, à l'apprécier davantage, à le juger plus favorablement, cette sympathie que j'ai accordée totale à un Baudelaire, à un Stendhal, à un Gourmont, à un France, à un Mozart et à Debussy, à lui [Gide], je la lui refuse en partie (E. Martinet).

Critique de haut vol, d'une impeccable impertinence (Michel Braudeau).

Pourquoi n'enverriez-vous pas un exemplaire [des Déracinés] à Rémy de Gourmont ? C'est un lépreux et un bavard, mais il a aussi des éclairs (Maurras à Barrès).

La mort de Remy de Gourmont est l'une des plus grandes pertes dont ait eu à souffrir la littérature européenne depuis la disparition d'Oscar Wilde. Un critique exceptionnel est aussi rare qu'un artiste exceptionnel, et le génie critique de Gourmont était un miracle de lucidité.

Il a écrit sur tout — des subtilités étymologiques de la langue française aux chastes réticences des taupes femelles. Il a touché à tout, et n'a rien touché sans l'embellir (Powys).

Pendant près de cinquante ans, de 1890 à 1940, la vie intellectuelle française a eu deux chefs d'état-major. Le premier mourut en 1915 : c'était Remy de Gourmont. André Gide lui succéda. [...] Le poste de commandement de Gourmont était le Mercure de France, celui de Gide la NRF. Grâce à eux, ces deux revues ont régenté les lettres dans le monde entier ; elles ont été les journaux officiels de la pensée occidentale. Quoique Gide, qui fit beaucoup de bruit et qui a eu le prix Nobel, soit encore présent à toutes les mémoires, alors que Gourmont est un peu oublié, c.est sur celui-ci et sur sa gloire posthume que je parierai le plus volontiers (J. Dutourd)