Georges Duhamel : Paul Claudel, p. 673
André Rouveyre : Visages : CIII. Pierre Lasserre, p. 703
Francis Jammes : L'Auberge des Poètes, p. 704
Guy-Charles Cros : Poèmes, p. 712
Marguerite Le Fur : Le Bonheur d'être nu, p. 720
E. de Rougemont : Portraits graphologiques : MM. Henri de Régnier, Pierre Louys, Maurice Maeterlinck, Paul Adam, Mme Colette Willy, M. Jehan Rictus, p. 731
Georges Palante : Autour d'une thèse refusée en Sorbonne, p. 754
Eugène Montfort : Les Noces folles (Première partie : I-IV), roman, p. 771

REVUE DE LA QUINZAINE

Remy de Gourmont : Epilogues : XXe Lettre à l'Amazone, p. 801
Georges Duhamel : Les Poèmes, p. 803
Rachilde : Les Romans, p. 807
Jean de Gourmont : Littérature, p. 814
Edmond Barthèlemy : Histoire, p. 820
Henri Mazel : Science sociale, p. 826
Charles-Henri Hirsch : Les Revues, p. 832
R. de Bury : Les Journaux, p. 839
Gustave Khan : Art, p. 843
Henri Albert : Lettres allemandes, p. 848
Henry-D. Davray : Lettres anglaises, p. 853
Ricciotto Canudo : Lettres italiennes, p. 857
Georges Rouault : Variétés : Ingres ressuscité, p. 863
Mercure : Publications récentes, p. 865

Echos, p. 867
Tables de l'année 1912 , p. 871


LITTÉRATURE

Georges Soulié : Essai sur la Littérature chinoise, 1 vol. in-18, 3.50, « Mercure de France ». — P.-J. Jouve : Les Directions de la Littérature moderne, 1 plaq., « Société Française d'Imprimerie et de Librairie ». — Henri-Martin Barzun : l'Ere du Drame, Essai de synthèse poétique moderne, 1 vol. in-18, 3.50, « Figuière ». — Robert de Montesquiou : Brelan de Dames, Essai d'après trois femmes auteurs, 1 vol. in-18, 3.50, Fontemoing.


LES REVUES

La Nouvelle Revue Française : « Poèmes de France », par M. Tristan Leclère. — La Revue de Paris : « l'Abîme », poèmes de Mme la Comtesse de Noailles. — La Vie : hommage à Odilon Redon : MM. P. Bonnard, M. Denis, G. Desvallières, M. de Groux, Hermann-Paul, P. Séruzier. — « Confidence d'artiste », par M. O. Redon. — La Phalange : « un poète coloriste et symboliste au XVIIe siècle : du Bois-Hus », révélé par M. Ch, Oulmont.— Memento.

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MEMENTO. — Revue bleue (9 novembre) : — M. Paul Flat : « Une évolution de l'Académisme. » — M. Roques de Fursac : « Débilité mentale, alcool et revolver. » — (19 novembre) : M. Michel Brenet : « Le Messie et les dernières années de Haendel. » — M. E. Fournal : « Dans Stamboul mobilisée »

La Revue hebdomadaire (9 novembre) : — « Notes sur le jury par un Président d'Assises. » — M. J. d'Elbée : « Louis XIV à trente ans. » — (16 novembre): M. H. Lebeau : « A Ceylan : une visite aux plantations de thé. »

La Vie Française (octobre) : *** « La Politique du Vatican. » — M. Ch- Pernot : « Poèmes. » — M. J. Clément : « L'Art de se convertir. »

L'Amitié de France (novembre. 1912-janvier 1913) : — M. G. Dumesnil : « L'œuvre d'Emile Mâle. » — « Les Sybilles », poème de M. A. Praviel. — M. C.-C. Charaux : « Hippolyte Taine à l'Ecole Normale. »

Le Correspondant (10 novembre) : — « L'Abrogation des lois d'exil en 1871 » avec neuf lettres du comte de Paris, par M. C.-E. Desjoyeaux. — M. G. Louis-Jaray : « Uskub. Notes de voyage. » — M. Lefèbvre Saint-Ogan : « Un Mouvement provincialiste en 1830. » — « Poésies » de M. Ch. Péguy.

La Flora (15 novembre) : — « Quatre poèmes » de M. Camille Mauclair. — « Marius, groom », par M. R. Lalli.

Les Marches de l'Est (10 novembre) : — M.P.-A. Helmer : « La Rançon de la prochaine guerre. »

Revue des Poètes (10 novembre) : — « La Poésie d'Auguste Angellier, par M. A. Koszul. Cette revue ouvre une souscription pour l'érection d'un monument à la gloire du poète de Dans la lumière antique.

La Revue (15 novembre) : — « Noel Santini (la bête noire de la Sainte Alliance) », par M. A. Canuef. — M. Frantz Jourdain : « La Maladie du Passé. » — M. le Dr Max. Nordau : « Les Sports d'Hiver. » — « M. Ch. Simond : « Chefs d'Etat des Balkans. »

Ombres et Formes (novembre) : — M. Jules Bois : « Le Corps de la Femme est le Temple vivant de la Paix. »

La Revue du mois (10 novembre) : — M. G. Heymans : « Le Siècle futur de la psychologie. » — M. L. Léger : « Une excursion à Sofia. »

Le Feu (novembre) : — M. Emile Sicard : « Le Jardin du Silence et la Ville du Roy », poèmes (suite). — M. Martin-Mamy : « Un Poète Catholique. »

La Renaissance Contemporaine (14 novembre) :— M. Ed. Schuré : « L'Evolution poétique. » — « A propos des Balkans », par M. Tony-Révillon.

Les Marches de Provence (novembre) : — « Francis Carco », par M. J.-M. Bernard. — « La Chanson des Bien-Aimées », poème de M. Lucien Rolmer.


LES JOURNAUX

Ernest Raynaud (le Temps, 9 décembre). — Les deux Rives (l'Intransigeant, ler décembre).

Je trouve, de M. Jean Lefranc, dans Le Temps, le récit d'une visite à M. Ernest Raynaud, récit des plus agréables où l'on voit revivre un des aspects lointains du symbolisme et quelques traits de l'école romane, manifestations poétiques où M. Raynaud ne prit pas une médiocre part. M. Lefranc est allé le voir à un bureau de commissaire à Plaisance et il en a rapporté l'image d'un poète que n'ont pas détourné de la contemplation littéraire de longues années de magistrature active. Ce gros homme cordial est à la fois un ironiste et un élégiaque. Il sait beaucoup de choses et, quoiqu'il parle volontiers, il n'en dit que ce qu'il veut, gardant le principal pour les souvenirs qu'il écrira un jour, en manière de préface à ses poésies complètes. Beaucoup m'intriguent ses rapports avec Anatole Baju, non moins que la psychologie dudit Baju. Mais Ernest Raynaud fut mêlé à tant de choses que ce n'est là qu'un intermède dans sa vie ; c'en est aussi le moment ironique et même parodiste. Sa plus glorieuse période fut celle de la fondation de l'école romane, qui fut plus durable qu'on ne croit, car une partie des poètes contemporains relèvent des Stances, qui en furent le monument.

Après le Carnet d'un décadent, il donna le Signe, son premier recueil de vers, puis, en 1889, Chairs profanes, et l'année suivante, les Cornes du faune. Le Signe a déjà les qualités qui distingueront les oeuvres suivantes : délicatesse et clarté, mais où transparaissent pourtant des traces du labeur qu'elles ont coûté au poète. Le sonnet Ton ombrelle est charmant et aussi peu décadent que possible !

... J'en aime autour de toi le voltigeant éveil.
Je ne sais quoi d'agile en vient à ta personne
Et c'est elle qui fait qu'à tes cheveux rayonne
Quelque chose comme une poudre de soleil.

Presque tout cela n'est que légendes rimées pour Fragonard et Watteau, madrigaux mièvres et jolis où se prolonge l'écho des Fêtes galantes :

Il est pâle et supplie. Elle est toute tremblante,
Sa main abandonnée un instant a frémi.
Chaque mot qu'à mi-voix lui soupire l'ami
Fait éclore à sa joue une rose brûlante.

Le sonnet A Paul Verlaine :

Tant qu'on verra Cypris diviser l'univers
En deux égales parts d'accalmie et d'orage...

est d'une cadence et d'un dessin sans défaut. Et la pièce Elégie votive a ce parfum agreste des Jeux rustiques et divins, qu'on respire souvent, mais plus fort et continu, dans l'œuvre de M. Henri de Régnier :

Je t'apporte en offrande, ô reine des amours,
La flûte où ma jeunesse a chanté les beaux jours...

La dualité de travaux qu'imposent à M. Ernest Raynaud sa condition et ses goûts se décèle pareillement, dirait-on, dans son inspiration ; l'auteur des Chairs profanes est aussi l'auteur des Amours d'Emilie, où l'on entend cette édifiante invocation :

O bonheur ! quand l'orage assiège l'horizon,
D'être, au milieu des siens, tranquille en sa maison...

Le Bocage (1895) fut une des manifestations de l'Ecole romane. Le Pèlerin passionné de Moréas avait déjà paru et troublé les cénacles. Le Bocage s'ornait aussi de ce faux archaïsme roman, que ses inventeurs s'empressèrent d'abandonner. C'est un livre inégal comme souvent ceux qui le suivront : le Poème de Narcisse, voisin dans le livre de celui de la Syringe poursuivie, lui est tellement inférieur qu'on le dirait écrit par un mauvais imitateur de M. Ernest Raynaud. La pièce souvent citée :

Le morceau de jardin qui rit sous mes volets
S'attendrit au printemps de lilas violets...

est en effet de couleur et de musique agréables. A propos de l'ode A Moréas, qui se termine ainsi :

Maître ! si tu m'inscris au rang de tes Lyriques,
Mon front démesuré grandira jusqu'aux cieux,

on pourrait observer — si cette remarque ne sonnait trivialement parmi tout ce lyrisme — que, lorsqu'ils échangeaient des louanges sur la lyre, les poètes de l'Ecole romane n'y allaient pas de main morte... En 1899, parut la Tour d'ivoire (laquelle est transparente comme l'œuvre du poète où seul le Bocage est un peu opaque), puis, en 1906, la Couronne des Jours, presque entièrement composée de sonnets consacrés à des villes. Voici Charleville, pays d'Arthur Rimbaud, et voici Bruges :

Chose espagnole abandonnée en pleine Flandre.

Enfin, M. Ernest Raynaud, qui devait plus tard composer l'Apothéose de Jean Moréas, a écrit une Assomption de Paul Verlaine, précédée de « Considérations » fort éloquentes, mais que n'approuvent point tous les admirateurs du grand poète de Sagesse. M. Ernest Raynaud veut que nous vénérions les « poètes maudits » sans oser les regarder de près comme un soleil plein de taches que la religion poétique commanderait de croire immaculé. Contentons-nous d'aimer l'œuvre des bons poètes et abandonnons leur personne, qui n'est qu'humaine, au libre jugement des hommes.

Ce n'en est pas moins un noble geste que celui de M. Ernest Raynaud, poète exact et discipliné, fonctionnaire parfait, chez qui la prévoyance et la prudence ne sont pas des vertus inactives, se faisant le panégyriste courageux et le vengeur de l'irrégulier Paul Verlaine.

Considéré dans l'originalité de sa profession coïncidant avec son art, M. Ernest Raynaud inspire le respect et l'estime. Si quelqu'un n'aimait ni les policiers ni les poètes, il aimerait pourtant M. Ernest Raynaud, qui sait être, en ces deux états, digne et sensé, fier et sensible, loyal et résigné Le contraste est plaisant et parfois même touchant en cet homme aux grosses moustaches, à la grosse voix, à la redingote sanglée, devant qui des gardiens de la paix exécutent l'automatique salut militaire, et qui a modulé des romances sentimentales et candides comme celle des Amours d'Emilie :

Elle est retenue au loin,
Ma divine fiancée.
Mais j'ai le ciel pour témoin
Qu'elle habite ma pensée.

Mais loin de son commissariat, dans la maison tranquille et claire où plane, avec le souvenir d'une légende galante, l'odeur des feuillages d'alentour, M. Ernest Raynaud, au milieu de ses livres, apparaît tel que lui-même se voudrait sans doute, si le sort lui avait laissé choisir son chemin. Le vaste vestibule orné de palmiers qui ombragèrent la fenêtre du Pauvre Lelian : dans le salon, il dit avec orgueil d'un vieux siège usé qu'il entoure de vénération : « C'est le fauteuil de Verlaine ; Moréas et Oscar Wilde sont venus s'y asseoir aussi. »

Voilà en abrégé l'histoire d'un de nos poètes les plus pittoresques.

§

Encore des visites. M. Maurice Verne est allé voir, pour l'Intransigeant, M. Pau! Fort d'une part et de l'autre M. Paul Reboux lesquels sont en guerre, !'un commandant l'armée de la rive droite l'autre l'armée de la rive gauche. Un premier papier a paru concernant Paul Fort et le diocèse des Lilas (1). Un second traite de M. Paul Reboux. En voici le début :

Le bureau de M. Paul Reboux, au Journal, six heures du soir.

— La Rive Gauche... tenez, la voilà toute, oui, tout entière j'ai voulu la faire entrer au Journal même... j'ai donné des extraits de toutes les revues les pentes, les grandes : le Mercure de France, la Phalange, les Marges, la Plume, les Loups... que sais-je... tenez, tenez...

M. Paul Reboux ouvre un grand cahier où sont reliées des pages du Journal. Au passage, il relit une phrase, s'arrête devant une étude d'art ou un morceau de critique, déjà touchés par le temps, grâce à leur vocabulaire technique, prétentieux, arbitraire...

— Et des vers... en ai-je reproduit, des vers... jusqu'à des vers parus en province. Que vous dirais-je... voilà une poésie prise dans la Gazette Aptésienne, la Gazette Aptésienne ! ! ! Ecoutez si c'est charmant !

Et, levant le cahier, M. Paul Reboux, lentement, amoureusement, se met à lire. Sa voix sculpte et enveloppe tour à tour la poésie. C'est la diction d'un poète. D'ailleurs, M. Paul Reboux ne nous a-t-il pas donné trois volumes de vers...

Et de ses doigts blancs
Cueille, à gestes lents,
Des reflets tremblants
De lune...

On frappe à la porte ; l'huissier entre. Et, désormais, il entrera dix fois dans une minute. C'est l'heure que les littérateurs, jeunes ou connus viennent proposer de la copie, soumettre des articles, des nouvelles, toute leur marchandise spirituelle...

M. Paul Reboux ne s'arrête pas pourtant dans sa lecture passionnée Il tend la main à l'huissier, sans regarder, et l'homme, qui a l'habitude, insère entre les doigts les cartes des visiteurs, toutes les cartes...

Sur la voix du récitant montent les gammes des machines à écrire ; les discussions, à voix aiguë, des collaborateurs dans les bureaux voisins, le tumulte, enfin, de la rue Richelieu, creuset étroit où roulent des lumières avec les sonneries vibrantes des autos. Le Boulevard, le Boulevard... Nous le dominons de ce dernier étage de l'immeuble du grand quotidien. Et comme nous voilà loin du Café provincial de la Rive Gauche !

Mais, quand les vers du petit poète provincial ont été lus M.Paul Reboux fait un geste ravi.

— Si frais, n'est-ce pas, sur notre fièvre !

Hélas ! sous la main agitée, toutes les cartes ont chu. Nous les avions oubliées! Elies s'éparpillent sous le fauteuil, dans l'ombre du bureau américain. C'est un désastre. Nous nous sommes accroupis pour les ramasser et l'huissier, qui entre en apportant d'autres, se met, comme nous, à quatre pattes... C'est une scène bien curieuse. Et ces cartes, qui semblent fuir à notre approche, s'anéantir dans les coins sombres, entre les pistes glissantes des points de Hongrie !

Enfin, nous les rattrapons toutes. Je les pose sur le plateau du bureau.

M. Paul Reboux est allé à un cartonnier, tire un casier, y cherche un document.

— La Guerre des Deux Rives, si, elle existe l... Mais, voyons, ils s'organisent, là-bas, cohortes serrées derrière les princes, brûlent d'engager la bataille, de vaincre cette Byzance pourrie qu'est la Rive Droite... Une jeune revue voulut composer un numéro spécial rien qu'avec les bévues de Binet-Valmer, Henri Duvernois et moi... une sorte de sottisier-pilori, quoi ! . Nos livres furent envoyés chez un jeune licencié ès-lettres de la Rive Gauche, avec prière d'annoter sans pitié... Soit que cette besogne lui parût un peu répugnante, soit qu'il nous méprisât trop pour nous faire subir le sort qu'on infligea à Flaubert, il s'y refusa... Voilà donc trois boulevardiers saufs cette fois-ci... Mais que leur réserve demain, à eux, aux autres, à tous ceux qui, ayant des lecteurs, un journal ou un théâite, bref, du succès, sont devenus des boulevardiers et des ennemis ?

Et, ponctué par l'entrée mathématique de l'huissier :

— Le Boulevard, qu'est-ce, en définitive?... Eh bien ! c'est Flaubert, Maupassant, Loti... Voilà nos maîtres : à eux trois, ils bétonnent les assises spirituelles de la littérature, logique et nécessaire, d'aujourd'hui !

(C'est bien cela, Monsieur, Madame et Bébé. Cependant, quelque chose me choque dans la trilogie; Flaubert a vraiment trop l'air d'un éléphant qui se promènerait avec un mâtin et un carlin. Il faut avoir le sens des proportions. C'est peut-être là l'origine vraie du différend. Je propose Bourget, d'accord avec Laurent Tailhade. On se souvient :

Bourget, Maupassant et Loti
Se trouvent dans toutes les gares.
On les offre avec le rôti,
Bourget, Maupassant et Loti.
De ces auteurs soyez loti
En même temps que de cigares ;
Bourget, Maupassant et Loti
Se trouvent dans toutes les gares.

Et dans tous les bureaux de rédaction.

(1) Ce mot diocèse est une coquille (pour brasserie), mais trop belle pour que je la corrige. C'est du Sainte-Beuve.

R. DE BURY.


ÉCHOS

— L'origine lorraine de Chopin. — Les manuscrits de L. N. Tolstoï. — Prix littéraires. — Société des Artistes Indépendants. — Publications du Mercure de France. — Le Sottisier universel.