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La Comédie-Française de Rouveyre, préface de Robert de Montesquiou, Albin Michel, 1906

Y a-t-il eu une édition en 1905 ? voir infra les Annales (j'ai le numéro sous les yeux)


Echos

M. André Rouveyre vient d'éditer un album sur la Comédie-Française, où figurent, burinés d'une main spirituelle et délicate, les portraits-charges des acteurs de la Maison. Nous reproduisons, dans le Supplément, quelques-unes de ces délicieuses silhouettes. Et nous y ajoutons quelques lignes de la remarquable préface de M. de Montesquiou, qui les commente : (Les Annales politiques et littéraires, 3 décembre 1905, p. 361).

Dans ce volume-album, où la Comédie française est « croquetée », M. Rouveyre se montre caricaturiste au sens strict du mot, au sens que le grand Daumier dans le moindre de ses croquis dépasse de haut et loin, et que Gavarni agilement élude. Mais il est impossible de nier la science et l'adresse d'André Rouveyre. M. Robert de Montesquiou, dans la préface extrêmement curieuse qu'il a écrite pour cette publication, nous rappelle que « nous sommes redevables à ce nom de Rouveyre (Edouard Rouveyre) de cette édition des dessins de Windsor parmi lesquels figurent, pour ne parler que de ceux-là, ces deux prodigieux traités, De l'atmosphère et De la chevelure. » André Rouveyre a certainement beaucoup profité des études d'Edouard Rouveyre, et il se souvient à propos de la caricature géométrique de Léonard en nous donnant « pour le portrait d'une jolie femme (Mlle Suzanne Derval) un triangle coiffé d'une ellipse. » Toutefois, géométrique tant qu'on voudra, le dessin même caricatural de Léonard n'est jamais sec et petit (Charles Morice, « Art moderne », Mercure de France, 1er janvier 1907, p. 156).

« 31 Décembre 1905 [sic].
« 3, place de la Sorbonne.

« Monsieur le Directeur,

« Dans le numéro du 1er janvier 1907 du Mercure de France, M. Charles Morice veut bien juger à la hussarde un volume-album paru dernièrement et qui est, non pas une œuvre originale, comme M. Morice semble vouloir le laisser entendre, quoiqu'un avertissement placé en tête du volume ne laisse aucun doute à ce sujet, mais la reproduction « au trait » de lithographies parues en 1905.

« Je trouve les appréciations de M. Morice beaucoup trop hâtives et beaucoup trop radicales ; je m'étonne qu'il se permette d'abriter derrière son autorité des insinuations regrettables et Insuffisamment documentées ; il me semble qu'avant de traiter si cavalièrement un ensemble de lithographies originales, pour le moins consciencieuses, il soit nécessaire de les consulter avec quelque soin et non, comme le fait M. Morice, de s'en rapporter à une sorte de catalogue illustré lancé en librairie ; — cet examen n'eût peut-être point donné meilleure impression à M. Morice (de cela je ne me plaindrais pas, je ne sais que trop la difficulté d'établir œuvre intéressante, et je connais aussi le prix d'une opinion autorisée), mais il l'eût dissuadé de me présenter à vos lecteurs sous une allure d'aigrefin « habile » accommodant les travaux de son père et la géométrie de Léonard en une salade grossière. Je proteste vivement au sujet de la note malveillante de M. Morice, et vous prie, monsieur le Directeur, d'insérer cette lettre dans votre prochain numéro, à la même rubrique où parut cette note, et composée avec les mêmes caractères : c'est à votre courtoisie que je fais appel pour cela.

« Veuillez agréer, monsieur le Directeur, l'expression de mes sentiments très distingués.

« ANDRÉ ROUVEYRE. »

Il suffira au lecteur que pourrait intéresser le petit débat soulevé par M. André Rouveyre de se reporter au dernier numéro du Mercure (page 156) pour s'assurer que, dans une appréciation de la Comédie française, je n'ai pas dépassé les droits de la critique. Que l'artiste ait profité des études doses devanciers et surtout de son père, quoi de plus naturel ? Je l'ai dit sans malveillance, directement. Est-ce l’habitude de la déformation caricaturale qui induit M. Rouveyre à chercher aux paroles les plus simples une interprétation compliquée ? (Charles Morice, « Art moderne », Mercure de France, 15 janvier 1907, p. 358)

Ernest la Jeunesse, parlant des caricatures d'André ROUVEYRE, a écrit : « Il ne prend pas le temps d'écorcher son client ou sa cliente ; il le sert, ou la sert, sans raffinement de cruauté et sans fignolage sanglant. » En deux ou trois traits — sans la moindre ombre — il a campé son bonhomme, ou plutôt il l'a déformé, disloqué : ce n'est plus qu'un pantin, dont un invisible gnome tirerait les ficelles.

Et, bien que tout en lignes, son dessin est de la plus parfaite ressemblance ; à part seulement que ses « pourtraicturés », comme le fait spirituellement remarquer l'étincelant préfacier M. Rémy de GOURMONT, semblent avoir une vague parenté avec telle ou telle bête de notre connaissance.

C'est ainsi que, dans le présent album, sur la Comédie-Française, M. Le Bargy pourrait être pris pour un carlin ; M. Duflos, pour un autour ; M. Truffier, pour un héron ; M. Berr pour... Consul ; Mme Segond-Weber, ainsi qu'il convient, est un aigle ; Mlle Leconte, une sauterelle... M. Rouveyre est, décidément, bien irrévérencieux ; qu'il prenne garde aux représailles ! (« Revue biblio-critique »,La Chronique médicale, 1er juilllet 1909, p. 448.)

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ERRATUM

P. 448, ligne 26, lire M. R. de Montesquiou, au lieu de M. Remy de Gourmont.

Lapsus calami d'autant plus excusable que ce dernier a préfacé un autre album de M. Rouveyre, le Gynécée, dont il sera, tout prochainement, rendu compte ( La Chronique médicale, 15 juilllet 1909, p. 457).