SOMMAIRE

REVUE DE LA QUINZAINE (extraits)
Jean de Gourmont : Littérature.

[...] Voici, enfin, avec La Muse aux besicles [...].

Charles-Henry Hirsch : Les Revues.

A propos de l'inauguration du buste de Remy de Gourmont, [...].

Notes et documents littéraires.

Claude Hariel, Les Ancêtres de Remy de Gourmont.

Mercure : Publications récentes.

Echos.

Pataphysique : Sur la relativité du poids des jambons, à propos de Remy de Gourmont, de Fabre et des fourmis, pp.861-862.

Monsieur le Directeur,

Dans une étude sur Remy de Gourmont et les fourmis, M. Cornetz rappelle, dans le Mercure du 15 août, la curieuse hypothèse de Delbeuf citée par Poincaré.

Si pendant la nuit. toutes les dimensions de l'univers devenaient mille fois plus grandes, quand je me réveillerais le lendemain, je ne m'apercevrais de rien.

Oui, mais il y a quelqu'un qui se douterait bien d'un changement dans l'univers,dit M. Cornetz, c'est le charcutier du coin, car en ouvrant sa boutique il trouverait tous ses jambons par terre.

En effet le poids des jambons, proportionnel au volume, aurait augmenté un milliard de fois, tandis que la résistance de la ficelle proportionnelle au diamètre, ne se serait accrue qu'un million de fois.

Les jambons seraient donc mille fois trop lourds pour la ficelle.

Est-on certain que les choses se passeraient ainsi ?

Il y aurait certainement accélération de la force centrifuge par l'effet de l'élargissement de la circonférence terrestre pour une durée de rotation invariable, donc par l'effet de l'éloignement du centre de la terre. Le problème est du ressort des mathématiques et pourrait tenter un calculateur. Peut-être arriverait-on alors à cette conclusion opposée que le jambon un milliard de fois accru serait relativement plus léger ?

A propos de relativité, signalons une autre illusion provoquée par les évolutions de l'aviateur qui écrit un nom illustre dans le ciel parisien...

Un journaliste écrit : "Et ce qui accroît encore la difficulté de cette performance, c'est que l'aviateur écrit à l'envers."Ce chroniqueur n'a pas réfléchi qu'il n'y a ni endroit ni envers dans l'espace. Suivant que l'observateur est placé en deçà ou au delà du plan vertical dans lequel évolue l'avion, il voit celui-ci voler de droite à gauche ou de gauche à droite. Ainsi il a l'illusion que l'aviateur écrit à l'endroit ou à l'envers, car tout est relatif dans le mouvement.

Veuillez agréer, etc Z.


[...] Voici, enfin, avec La Muse aux besicles d'André Billy, de la critique vivante, et dont la plupart des études, sinon toutes, ont paru dans des journaux. Et à ce propos M. A. Billy définit le rôle de la critique dans les journaux, qui est

d'assurer, en collaboration avec l'enseignement des écoles, le recrutement de l'élite, de développer et de cultiver le goût des lecteurs, d'introduire peu à peu ceux d'entre eux qui sont susceptibles d'initiation à une vie intellectuelle supérieure. Elle est en somme, et je m'excuse de le déclarer d'un ton si tranchant, la forme la plus haute du journalisme.

Certes, dit encore M. Billy, la critique a pour but définir la philosophie d'une œuvre, son esthétique, sa place dans l'histoire littéraire, etc., mais elle peut aussi dire autre chose et, par exemple, quel homme est l'auteur, comment il a le nez fait, comment il se tient à table. On trouvera dans les pages qui suivent quelques essais de critique, inspirés de cette méthode...

II y a en effet, dans ces essais sur des écrivains dont A. Billy connaît non seulement les œuvres, mais dans quelle atmosphère elles ont été conçues et réalisées, des détails qui nous touchent et nous font mieux comprendre tel poème ou tel roman. Ce n'est pas sans émotion que je retrouve dans ce volume l'article qu'André BilIy consacra dans un journal, pendant la guerre, à Remy de Gourmont et à la rue des Saints-Pères.C'est, à côté de la critique, un peu de vie fixée, et c'est ce qui rend ce livre si vivant et si attrayant, qu'il s'agisse d'Apollinaire, de Jean Giraudoux, de J.-H. Rosny aîné, de Bachelin, de Marcel Proust, de Maurice Rostand ou de Pierre Benoit. De plus en plus la critique se fera indiscrète, et peut-être ne se contentera-t-elle pas de savoir comment un auteur a le nez fait.

Je veux signaler en terminant la nouvelle collection littéraire "Alter Ego" que vient de lancer, sans inutile fracas, François Bernouard, l'ironique et tendre poète de la Berlue Rayonnante. Voici dans cette collection d'une typographie parfaite où les bois gardent eux aussi leur caractère typographique une version nouvelle par Léon Bazagette des Dormeurs de Walt Whitman. Whitman, le grand initiateur de la neuve poésie et qui fut à la fugace école surnaturaliste ce que E. Poe fut au symbolisme.