Grains de mil de Campagnou

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Paul Voivenel, Grains de mil de Campagnou, préface de Jacques Douyau (alias Adam Saint Moore)
Toulouse, Imprimerie du Centre, 1964

C'est aussi l'union avec la terre natale qui me fait, quand je vais chez un écrivain que j'aime, cueillir une fleur de « chez lui » pour la placer dans un de mes livres. C'est ainsi que, page 80 de « La petite ville », j'ai une rose du rosier de la fenêtre de sa chambre de Coutances, descendante de celle que Remy de Gourmont, le « Reclus » par sa laideur faciale, a célébrée de façon si poignante et que m'offrit la sœur de l'écrivain, Marie de Gourmont ; ainsi encore la pensée cueillie pour moi dans « l'allée de ses réflexions » par Mme de La Cour Grandmaison, au château de Montaigne ; un liseron de l'étang de La Chesnaie, placé dans « Paroles d'un croyant » ; quelques « herbes » de Délos et de l'Olympe, dans « La prière sur l'Acropole », envoyées par mon ami le docteur Gérassime de Loverdo ; au milieu du « Cimetière Marin », quelques feuilles du maquis corse qu'alla chercher pour moi, à cheval, Evelyne Gabrielli, alors adolescente, et parente de Valéry, épanouie soudain vedette à Paris, dans « La lune est bleue », et qui mariée a eu la sagesse de quitter les planches et de compléter son bonheur par le plus beau rôle d'une femme, celui de maman ; dans « L'esprit des lois » j'ai mis la fleur de pétunia qu'au château de la Brède, j'obtins du commandant de Bellaing, conservateur, après que nous venions de nous éjouir ensemble des vers malicieux et sensuels que le captivant président à mortier avait écrits pour une jolie femme.

*

J'ai une fleur dans chacun de mes dictionnaires. Dans un « Petit Larousse illustré » un edelweiss du Montcalm. Je l'ai cueilli moi-même quand je pouvais monter avec les jambes.

Je monte plus haut avec mes yeux.

Et avec mon cœur, jusqu'à Dieu.