1. Lettre à Maurice Boissard [Paul Léautaud] du 9 mai 1924, écrite à propos de l'article de ce dernier, « Notes et souvenirs sur Remy de Gourmont », Nouvelles littéraires (1).

Coll. Maurice  Poccachard.

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Ce 9 mai 1924.

Compère Boissard (2),

Oui, Gourmont eut le... bovarysme (expliquerait Jules de Gaultier) de bouffer du curé. C'est M. Prudhomme en tire-bouchons, écrivit notre ami Léon Daudet. Et parfois M. Homais en tire-bouchons, et après tout, le pharmacien d'Yonville était son voisin de clocher ! Mais cela signifie simplement que ce succulent penseur n'était à l'aise au fond que dans les idées pures ! La preuve même qu'il était catholique, ainsi que nous tous Français depuis dix-huit siècles, est ce qu'il nommait son paganisme et sa répulsion des huguenots. C'est donc à bon droit qu'on l'enterra catholiquement, comme le voulut être Soury.

[...] Remy de Gourmont « épilogua » comme nous savons, in abstracto du « joujou patriotisme » par protestation contre des sots, et, surtout à une époque où il le pouvait opérer en restant dans la sphère des idées pures. Mais quand le fait brutal, saignant, apparut, Remy de Gourmont réagit selon les mêmes dix-huit siècles de sa vie antérieure. Et vos chiens, avec vos chats, s'ils pouvaient parler, et que j'estime d'avance autant que vous les estimez, c'est-à-dire au moins autant que votre cynique individualité, proclameraient qu'il eut raison, et l'approuveraient contre vous [...].


(1) In Fagus, Lettres à Paul Léautaud, Editions « La Connaissance », 1928. Avant-propos et notes du destinataire. Dixième volume de la collection « Les Textes », l'édition comprend 50 exemplaires sur Rives et 900 exemplaires sur Alfa.

Les Editions « La Connaissance », sous la devise « On se lasse de tout sauf de connaître », avaient été créées par René-Louis Doyon (Le Mandarin), libraire-éditeur, né à Blidah en 1885, et mort dans la misère en novembre 1966 alors que Malraux était Ministre de la Culture et que Doyon avait été son premier employeur, lui ayant appris le métier de libraire et celui d'éditeur qu'il fut ensuite. C'est également René-Louis Doyon qui finança en vendant ses livres et ses meubles la campagne pour faire libérer son protégé qui avait soustrait quelques statuettes à Angkor-Vat.

(2) Quelques qualificatifs de Fagus pour nommer Paul Léautaud : Cher Monsieur, Mon cher contemporain, Aimable contemporain, Exécrable Léautaud, Mon cher Boissard, Triste individu et cher confrère, Confrère (si je puis dire ) Boissard, Compère Léautaud, Compère Boissard, Infâme Boissard !, Compère Maurice Boissard, Infâme Boissard ; (j'insiste : point et virgule), Sycophante Boissard, « Vieux rossignol », Pudique voisin, Compatriote Léautaud, Monsieur l'exhibitionniste de Fontenay-aux-Roses, Ange Boissard, Introuvable voisin, Ange Boissard, Infâme mécréant... Inutile de préciser que ces lettres sont pleines d'esprit [notes de Maurice Poccachard, qui nous a communiqué la lettre ci-dessus].


A consulter :

Gabriel Brunet, « Littérature : Fagus : Lettres à Paul Léautaud », Mercure de France, 1er février 1929, p. 641

Charles-Henry Hirsch, « Les revues : Le Divan : fragments de lettres de Fagus : la poésie ; Stendhal », Mercure de France, 1er janvier 1935, p. 160-163

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